Face aux difficultés rencontrées au grand export, la société Viesly Industries Textile (VIT) a obtenu le 10/10/2017 son placement en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Douai.
C'est ce qu'indique Nord Eclair le 11 octobre dernier, la filature Viesly industries textiles (VIT) entreprise située à VIESLY (59) dans les Hauts-de-France, avec actuellement 95 salariés, a été placée en redressement judiciaire en raison des difficultés financières traversées depuis plusieurs mois. La procédure doit, en rendant possible l’étalement des paiements, permettre de préserver l’entreprise.
La société développerait à ce jour un projet à valeur ajoutée autour du lin.
Par Hélène Harbonnier de Nord Eclair | Publié le 11/10/2017
Entretien avec Florence Gröbli, responsable administrative et financière de VIT.
Viesly Industries Textiles - VIT
Dirigeant - CFG
Franck Gröbli possède aussi, entre autres,
les sociétés Velysam et Coloredo, implantées à Caudry.
Salariés actuellement : 95
Fond propre situation 2016 : 2 054 700€
Actif circulant situation 2016 : 6 101 700 (dont 3 065 100€ de stock)
Chiffre d'affaires 2016 : 21 058 500 €
EBE 2016 : - 1 718 700€
Filière Textile
– D’où viennent les difficultés rencontrées par VIT ?
« L’entreprise réalise 75 % de sa commercialisation au grand export, surtout en Amérique latine. Or, actuellement, la conjoncture n’est pas terrible, D’où une baisse de notre chiffre d’affaires de 25 %, et des problèmes de trésorerie. »
– Comment l’entreprise traverse-t-elle cette crise ?
« En plus des investissements qu’ils avaient déjà réalisés, nos actionnaires ont réinvesti cet été pour passer le cap, mais nous nous sommes rendu compte qu’il allait falloir adapter notre outil à la demande actuelle. Nous avons donc fait un acte de gestion de bon père de famille : nous sommes allés voir un conciliateur, qui nous a conseillé de demander la protection du tribunal pour préserver l’entreprise. C’est une entreprise familiale, que mon arrière-grand-père a créée. C’est notre bébé. On veut que ça continue. On fait tout pour. On a un projet autour du lin qui continue à se développer, et grâce auquel on espère vendre un produit avec une valeur ajoutée plus importante. Mais il faut un peu de temps. »
– Quelles sont les perspectives pour les 95 salariés de VIT ?
« On ne veut pas qu’ils soient inquiets. C’est vrai qu’on n’a pas pu verser les salaires ce mardi. Mais ils vont être pris en charge par l’AGS (régime de garantie des salaires, NDLR), en principe sous cinq à dix jours. On est tout à fait conscients que cela va poser des problèmes, mais le mandataire désigné par le tribunal va leur fournir une attestation pour leur banque. On aurait bien voulu faire autrement que passer par le redressement, mais c’est nécessaire pour qu’on continue. Cela va nous permettre d’étaler nos paiements, et de régler notre dette – pour moitié représentée par ce que nous devons à ENGIE – pour pouvoir repartir sur de bonnes bases. Après, le mandataire va certainement nous demander de réduire un peu l’effectif. Il y a trop de personnel par rapport à la production actuelle. On devra faire quelques licenciements. Beaucoup de nos salariés sont âgés, on trouvera des solutions au cas par cas. Depuis quelque temps, nous avions déjà mis en place du chômage partiel. »
– Une partie des salariés disait, mardi, craindre la fermeture pure et simple de VIT.
« La santé de l’entreprise n’est pas en péril. On a du matériel, des stocks, des capitaux. La dette, ce n’est pas grand-chose, je dirais 5 % du chiffre d’affaires. On va tout faire pour ne pas fermer. Vous savez, c’est quand même cent ans d’histoire familiale. »
– Comment se portent les autres entreprises du groupe(1) ?
« Ce n’est pas la grande forme non plus. Il faut préciser que pour Velysam, ce n’est pas du tout le même marché : si VIT vend du fil au grand export, Velysam vend des tissus en Europe. Le marché n’est pas terrible, mais un peu moins mauvais puisqu’il ne pâtit pas du taux du dollar. Il y a aussi une conciliation (pour l’étalement des créances, NDLR), mais à un stade beaucoup moins important. »
«Tout est contre nous»
« En ce moment, tout est contre nous », résume Florence Gröbli.
« Depuis quatre ou cinq ans, la SAS VIT a engagé un plan de renouvellement et de modernisation de son outil de travail pour un montant de plus de 6 millions d’euros, financés pour une bonne partie par les actionnaires, expose la responsable administrative et financière de VIT. Cet effort a permis la mise en place d’un nouveau process de filature unique en France (…). L’accueil de ce produit par la clientèle a été positif au point de représenter aujourd’hui près de 50 % de nos ventes. Mais ces investissements pèsent lourd dans la trésorerie de l’entreprise ».
« Moins de commandes depuis quelques mois »
S’ajoute à cela un contexte international peu propice au business, détaille Florence Gröbli. « Il y a des problèmes politiques au Brésil, d’autres liés aux élections américaines… En Europe, le contexte est également difficile : dans les pays vers lesquels on exporte (Italie, Espagne…), il y a un certain attentisme. Il y a donc moins de commandes depuis quelques mois. Parallèlement, les prix des matières premières se sont envolés : + 24 % en un an pour la viscose. Et la parité euro-dollar fait qu’on achète très cher pour des prix de vente pas très élevés… »
« D’habitude on tient, mais là, c’est trop »
Plus généralement, Florence Gröbli reconnaît que « le contexte du textile est difficile. Ça fait des années qu’on se bat. Si on a investi autant, c’est parce qu’on croit qu’avec de nouveaux produits, on peut redevenir un fleuron de l’industrie. C’est une bataille au quotidien, mais on n’est pas aidés par le marché… D’habitude on tient, mais là, c’est trop. »
Source Article Nordeclair.fr - En savoir plus c'est ICI
Crédit photos Le journal des entreprises - be.fashionnetwork.com - la voix du nord
Pendant longtemps le Nord de la France a habillé presque tout le pays en produisant des kilomètres de tissus. Au début des années cinquante le secteur employait encore plus de 170 000 ouvriers dans la région.
Les grandes filatures et lainières ont fermé les unes après les autres, victimes de la concurrence de pays à bas coût, mais le textile Made in France est encore présent à Roubaix, à Tourcoing et autour de Lille.
Ils sont encore plus de 12 000 à travailler dans des entreprises qui ont su se transformer, innover, pour maintenir des emplois sur un territoire historiquement lié au textile.
Enquête sur des tissus Made in France qui ne perdent pas le Nord.
Réalisé par Pierre Lascar